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27/04/2015

Le chat, la souris et les systèmes anti-missiles

Le chat, la souris et les systèmes anti-missiles

Le 19 avril 2015 – Source DEBKAfile

 

DEBKAfile est un site très proche des renseignements militaires israéliens, basé à Jérusalem. Il est spécialisé dans les commentaires et les analyses sur le terrorisme, l’espionnage, la sécurité nationale, militaire et les relations internationales, avec un accent particulier sur le Moyen-Orient [wikipédia].

 

Poutine avertit Israël : La vente d’armes à l’Ukraine pourrait déclencher la vente de S-300 russes à la Syrie.

 

L’avertissement du président russe Vladimir Poutine adressé à Israël et concernant la vente d’armes à Kiev – en réponse aux missiles de défense aérienne S-300 fournis à l’Iran par la Russie – ajoute une dimension européenne en plaçant Israël directement au coeur du litige qui oppose Moscou aux États-Unis au sujet de l’Ukraine. La menace implicite du dirigeant russe de répliquer en fournissant le même système de lancement de missiles à la Syrie qu’à l’Iran renvoie à un autre litige entre, d’un côté, la Russie et, de l’autre, les États-Unis et Israël, à savoir, le conflit syrien.

 

Les comptes rendu des services de renseignement déposés sur son bureau du Kremlin révèlent que non seulement les États-Unis et Israël (et la Jordanie) arment les forces rebelles dans le sud de la Syrie, mais qu’ils collaborent en vue de fournir à l’armée ukrainienne des armes pour briser sa confrontation incendiaire avec les séparatistes pro-Russes.

 

Au cours de la quinzaine écoulée, des milliers de conseillers militaires des États-Unis, du Canada, de France, du Royaume-Uni et d’Allemagne ont été envoyés en Ukraine pour former l’armée nationale. Les jours prochains, ce sont 290 officiers et soldats de la 173 e brigade aéroportée américaine qui sont attendus.

 

Les sources militaires de DEBKAfile révèlent que les arrivants se rassemblent au centre de formation de l’armée ukrainienne de Yavoriv, près de Lvov. Ce centre a été choisi comme point de rassemblement et de lancement des forces d’intervention occidentales et de l’OTAN dans le conflit ukrainien en raison de sa proximité de la Pologne.

 

Les escadrons aériens étatsuniens et britanniques qui y sont stationnés depuis quelques mois sont suffisamment proches pour assurer une couverture aérienne au centre de Yavoriv. Des militaires étatsuniens et britanniques sont également en poste en Pologne, disponibles pour prêter main forte aux Ukrainiens et apaiser les craintes des états baltes suite à l’annexion de la Crimée par la Russie en mars dernier.

 

Poutine a averti Washington à plusieurs reprises que fournir à Kiev des armes offensives aurait pour conséquence des mesures similaires de la part de la Russie, mesures susceptibles de nuire aux intérêts étatsuniens en Europe et ailleurs dans le monde. Il a tenté de faire passer cet avertissement par l’intermédiaire de la chancelière allemande Angela Merkel et du président français François Hollande, ainsi que lors de la rencontre du Secrétaire d’État John Kerry avec le ministre russe des affaires étrangères Sergueï Lavrov. Moscou, indique le message d’avertissement, n’épargnerait pas les intérêts des États-Unis après ce que Poutine considère comme les assauts de l’administration Obama contre la sécurité nationale de la Russie, au travers de l’absorption progressive de l’Ukraine par l’OTAN et de la fourniture d’armes offensives pour la campagne de Kiev contre les séparatistes pro-Russes.

 

La levée de l’embargo sur les missiles de défense aérienne S-300 destinés à l’Iran a été le premier pas du dirigeant russe en vue d’enfoncer le clou, mais ses représailles ne s’arrêteront sans doute pas là. Les missiles de défense aérienne n’ont pas encore été expédiés en Iran, mais si le président Barack Obama s’entête à fournir une assistance militaire étendue au gouvernement ukrainien, Poutine compte fournir des S-300 non seulement à l’Iran, mais également à la Syrie.

 

Le samedi 18 avril, le président russe s’est refusé à répondre lorsqu’il lui a été demandé si Moscou s’était abstenu d’envoyer des missiles S-300 à la Syrie à la demande d’Israël. Il n’en demeure pas moins qu’il a mentionné la Syrie dans la foulée, lorsqu’il a averti Israël de ne pas fournir des armes au gouvernement Ukrainien. Il a alors déclaré que cette initiative serait « contre-productive » pour les efforts de paix en Ukraine orientale.

 

La veille à Washington, Obama a déclaré qu’il était surpris que la Russie ait suspendu la vente de missiles à l’Iran aussi longtemps. Le président étatsunien a relevé que Poutine avait précédemment suspendu la vente « à notre demande. Franchement, je suis surpris que cela ait tenu aussi longtemps, étant donné que la vente de ces armes défensives n’était pas empêchée par des sanctions ». Le président étatsunien a choisi l’Ukraine pour son épreuve de force avec le président russe. Poutine, cependant préfère relever le gant en Iran et en Syrie.

 

Traduit par Gilles Chertier pour le Saker Francophone.

 

http://www.gilles-chertier.com/

http://lesakerfrancophone.net/

http://lesakerfrancophone.net/le-chat-la-souris-et-les-systemes-anti-missiles/

 

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Photo : Russian Ministry of Defense.

23/06/2014

Les pompiers pyromanes

Les pompiers pyromanes

Alain Cagnat, pour Terre & Peuple.

Dimanche, 22 Juin 2014, 17:02.

 

Voici l’Occident pris de panique. L’Etat Islamique d’Irak et du Levant (EIIL) est peut-être sur le point de s’emparer de Bagdad et de créer un califat terrifiant à cheval sur la Syrie et l’Irak.

 

Comment en est-on arrivé là ? Les Américains, suivis par leurs caniches européens, ont prétendu imposer la démocratie et les droits de l’homme en terre d’islam, avec deux objectifs complémentaires mais inavoués, mettre la main sur les gigantesques réserves de pétrole des bédouins et détruire toute puissance arabe hostile à Israël. Le chemin était tout tracé : abattre les dictateurs en place et les remplacer par de bons démocrates acquis aux intérêts économiques de l’oncle Sam. Ce schéma simpliste, élucubré par de brillants intellectuels qui n’avaient jamais mis les pieds au Moyen-Orient ou au Maghreb, oubliait deux paramètres essentiels : le facteur ethnique et le facteur religieux.

 

Rappelons quelques faits et désignons les coupables. Le 11/9 offre à Bush et ses néocons l’occasion d’envahir l’Afghanistan. Treize ans plus tard, l’armée américaine, vaincue par une bande de va-nu-pieds illettrés en babouches, s’apprête à quitter l’Afghanistan, non sans avoir perdu plus de 2 300 hommes. Dès lors, l’armée afghane « formée » par des instructeurs américains, se débandera et les talibans reprendront le contrôle du pays qui leur tend les bras.

 

En 2003, le même Bush et le servile Tony Blair envahissent l’Irak, sous le faux prétexte de la présence d’armes de destruction massive. Quatre ans plus tard, les Américains quittent l’Irak, la queue entre les pattes, non sans avoir perdu 4 800 hommes et transformé le pays en chaos. L’Irak n’existe plus, éclaté entre les chiites majoritaires soutenus par l’Iran, les sunnites fanatisés par l’Arabie saoudite et le Qatar, et les Kurdes tout heureux de fonder un Kurdistan autonome et riche en pétrole. Onze ans plus tard, la glorieuse armée irakienne, « formée » par des instructeurs américains, se débande et livre tout son matériel, un matériel sophistiqué et coûteux fourni par les Américains, aux djihadistes irakiens.

 

En 2011, Sarkozy, Lévy et Cameron attaquent la Libye de Kadhafi. Trois ans plus tard, la Libye n’existe plus, éclatée entre les tribus arabes de Tripolitaine et de Cyrénaïque, les Berbères à l’ouest et les touaregs et les Toubous au sud. La région de Benghazi est sous le contrôle des milices islamistes : on y tue même les ambassadeurs américains ! Quant à l’arsenal de Kadhafi, il s’est évanoui dans tout le Sahel. L’armée française est priée, avec des moyens dérisoires, de réparer les c… des trois irresponsables précités au Mali et en Centrafrique, en attendant l’embrasement de toute l’Afrique septentrionale.

 

En 2013, Hollande, conseillé par Lévy et Fabius, veut rééditer « l’exploit » de son prédécesseur. Il rêve d’abattre Bachar al-Assad. Cette fois, il s’agit de l’utilisation prétendue de gaz de combat. Au dernier moment, conseillé par Poutine, Obama fait volte-face, laissant le nain de l’Elysée en tête-à-tête avec sa pitoyable impuissance. Mais la Syrie n’est pas la Libye. Elle est au cœur du Moyen-Orient et une place stratégique pour la Russie. L’Armée syrienne libre (ASL) des « démocrates » amis de l’Occident vole en éclats et laisse face à face les forces légalistes de Bachar al-Assad appuyées par les Russes et les Iraniens (via le Hezbollah libanais), et une multitude de groupes islamistes qui rivalisent de fanatisme et sont armés et financés par le Qatar et l’Arabie saoudite. Les Occidentaux ferment les yeux et, malgré l’évidence, continuent de vouloir la perte de Bachar.

 

Le printemps arabe a bien nourri les illusions des benêts occidentaux. Passée la gueule de bois, ils se sont rendu compte que, partout, il avait débouché sur une progression de l’islamisme. Seule, l’Egypte y a échappé en rétablissant une dictature militaire.

 

Revenons à l’Irak. L’EIIL est dirigée par Abou Bakr al-Baghdadi, un dur qui renvoie le patron d’al-Qaïda Péninsule arabique (AQPA), Ayman al-Zahouari, au rang de second rôle. Pire, l’EIIL a pris le contrôle du front al-Nosra d’Abou Mohammed al-Golani à la suite d’une campagne de terreur qui n’est pas sans rappeler la lutte fratricide entre le FLN et le MNA en Algérie. Autrement dit, tous les combattants d’al Nosra qui refusaient de se rallier à l’EIIL ont été liquidés sans pitié ; les autres ont compris. Les Occidentaux sont désorientés : s’ils pensaient canaliser al-Qaïda, l’EIIL, forte de 17 000 djihadistes, paraît impénétrable. Son but n’est pas le terrorisme mais d’imposer un califat, le vieux rêve de ben Laden.

 

Ici il ne s’agit pas des va-nu-pieds folkloriques qui sévissaient en Afghanistan. L’affaire est beaucoup plus grave. Elle menace l’existence même de la Syrie et de l’Irak, mais devrait aussi se propager au Liban et en Jordanie. Les Occidentaux, avec la complicité de l’Arabie saoudite, de la Turquie et d’Israël, ont généré un monstre.

 

L’ironie du sort, c’est que les Américains se tournent vers l’Iran pour tenter d’empêcher la création de ce talibanistan. Alors qu’il n’y a pas si longtemps, ils étaient prêts – et les roquets français et anglais aussi -, à bombarder l’Iran. On s’avance donc vers une inversion des alliances. Comme l’accord intérimaire sur le nucléaire iranien expire le 20 juillet, on peut penser que Téhéran va faire monter les enchères. Les Turcs vont faire la gueule, mais surtout les Israéliens...

 

Alain CAGNAT

 

http://www.terreetpeuple.com/geopolitique-reflexion-69/1092-les-pompiers-pyromanes?2d4883b0bf7db295e9826020acb22e07=b47169fd3687f162165871ebf6ef3014

 

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10/09/2013

La recherche d'un prétexte à tout prix...

Intervention en Syrie :

La recherche d'un prétexte à tout prix.

 

( Centre Français de Recherche sur le Renseignement )

 

La coalition réunissant les Etats-Unis, le Royaume Uni, la France, la Turquie, l'Arabie saoudite et le Qatar vient de franchir un nouveau pas dans sa volonté d'intervenir en Syrie afin de renverser le régime de Bachar El-Assad. Utilisant ses énormes moyens de communication, elle vient de lancer une vaste campagne d'intoxication de l'opinion internationale afin de la convaincre que Damas a utilisé l'arme chimique contre son peuple, commettant ainsi un véritable crime contre l'humanité et méritant « d'être puni ».

Aucune preuve sérieuse n'a été présentée à l'appui de ces affirmations. Au contraire, de nombreux éléments conduisent à penser que ce sont les rebelles qui ont utilisé ces armes. Ces mensonges médiatiques et politiques ne sont que des prétextes. Ils rappellent les tristes souvenirs du Kosovo (1999), d'Irak (2003) et de Libye (2010) et ont pour but de justifier une  intervention militaire afin de renverser un régime laïque, jugé hostile par les Etats-Unis - car allié de l'Iran et ennemi d'Israël - et impie par les monarchies wahhabites d'Arabie saoudite et du Qatar.

Il est particulièrement affligeant de voir la France participer à une telle mascarade.

 

La falsification des faits

Depuis deux ans, des informations très contradictoires et souvent fausses parviennent en Europe sur ce qui se passe actuellement en Syrie. Il est ainsi difficile de comprendre quelle est la situation exacte dans ce pays. Certes, le régime syrien n'est pas un modèle démocratique, mais tout est mis en œuvre par ses adversaires afin de noircir le tableau, dans le but d'assurer le soutien de l'opinion internationale à l'opposition extérieure et de justifier les mesures prises à son encontre, dans l'espoir d'accélérer sa chute.

 

Cette falsification des faits dissimule systématiquement à l'opinion mondiale les éléments favorables au régime :

- le soutien qu'une grande partie de la population syrienne - principalement les sunnites modérés et les minorités (chrétiens, druzes, chiites, kurdes) - continue d'apporter à Bachar El-Assad, car elle préfère de loin le régime actuel - parfois par défaut - au chaos et à l'instauration de l'islam radical ;

- le fait que l'opposition intérieure, historique et démocratique, a clairement fait le choix d'une transition négociée et qu'elle est, de ce fait, ignorée par les pays occidentaux ;

- la solidité militaire du régime : aucune défection majeure n'a été observée dans l'armée, les services de sécurité, l'administration et le corps diplomatique et Damas est toujours capable d'organiser des manœuvres militaires majeures ;

- son large soutien international. L'alliance avec la Russie, la Chine, l'Iran et le Hezbollah libanais ne s'est pas fissurée et la majorité des Etats du monde s'est déclarée opposée à des frappes militaires, apportant son soutien total aux deux membres permanents du Conseil de Sécurité de l'ONU - Russie et Chine - qui ont clairement indiqué qu'ils n'autoriseraient pas une action armée contre la Syrie. Rappelons également que le régime syrien n'a été à ce jour l'objet d'aucune condamnation internationale formelle et demeure à la tête d'un Etat membre à part entière de la communauté internationale ;

- le refus délibéré des Occidentaux, de leurs alliés et de la rébellion de parvenir à une solution négociée. En effet, tout a été fait pour radicaliser les positions des ultras de Damas en posant comme préalable le départ sans condition du président Bachar.

Au contraire, l'opposition extérieure, dont on cherche à nous faire croire qu'elle est LA solution, ne dispose d'aucune légitimité et demeure très éloignée des idéaux démocratiques qu'elle prétend promouvoir, en raison de ses options idéologiques très influencées par l'islam radical.

De plus, la rébellion syrienne est fragmentée entre :

- une opposition politique extérieure groupée autour des Frères musulmans, essentiellement contrôlée par le Qatar et la Turquie ;

- une « Armée syrienne libre » (ASL), composée d'officiers et d'hommes de troupe qui ont déserté vers la Turquie et qui se trouvent, pour la plupart, consignés dans des camps militaires faute d'avoir donné des gages d'islamisme suffisants au parti islamiste turc AKP. Son action militaire est insignifiante ;

- des combattants étrangers, salafistes, qui constituent sa frange la plus active et la plus violente, financés et soutenus par les Occidentaux, la Turquie, le Qatar et l'Arabie saoudite.

Ainsi, la Syrie connaît, depuis deux ans, une situation de guerre civile et des affrontements sans merci. Comme dans tous les conflits, les victimes collatérales des combats sont nombreuses, ainsi que les atrocités. Toutefois, les grands médias internationaux qui donnent le ton - qui appartiennent tous aux pays hostiles à la Syrie - cherchent à donner l'impression que les exactions, massacres et meurtres sont exclusivement le fait du régime et de son armée.

Si certaines milices fidèles au régime ont commis des exactions, cela ne saurait en aucun cas dissimuler les innombrables crimes de guerre qui sont chaque jour, depuis deux, ans l'œuvre de la rébellion, et dont sont victimes la population syrienne fidèle au régime, les minorités religieuses et les forces de sécurité. Ce fait est systématique passé sous silence. Pire, les nombreux actes de barbarie des djihadistes soutenus par l'Occident, la Turquie et les monarchies wahhabites sont même souvent attribués au régime lui-même, pour le décrédibiliser davantage.

L'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), principale source des médias sur les victimes de la « répression », est une structure totalement inféodée à la rébellion, crée par les Frères musulmans à Londres. Les informations qu'il diffuse relèvent de la pure propagande et n'ont donc aucune valeur ni objectivité. S'y référer est erroné et illustre l'ignorance crasse ou de la désinformation délibérée des médias.

Enfin, face à ce Mainstream médiatique tentant de faire croire que le Bien est du côté de la rébellion et de ses alliés afin d'emporter l'adhésion de l'opinion, toute tentative de vouloir rétablir un minimum d'objectivité au sujet de ce conflit est immédiatement assimilée à la défense du régime.

 

Les objectifs véritables d'une intervention en Syrie

Dès lors, on est en droit de s'interroger sur les raisons réelles de cet acharnement contre Bachar Al-Assad et d'en rechercher les enjeux inavoués. Il en existe au moins trois :

- casser l'alliance de la Syrie avec l'Iran ; le dossier iranien conditionne largement la gestion internationale de la crise syrienne. En effet, depuis trois décennies, Damas est l'allié de l'Iran, pays phare de « l'axe du mal » décrété par Washington, que les Américains cherchent à affaiblir par tous les moyens, tant en raison de son programme nucléaire, de son soutien au Hezbollah libanais, que de son influence régionale grandissante ;

- rompre « l'axe chiite » qui relie Damas, Bagdad, Téhéran et le Hezbollah, qui est une source de profonde inquiétude pour les monarchies du Golfe qui sont, ne l'oublions pas, des régimes autocratiques et qui abritent d'importantes minorités chiites. Ainsi, Ryad et Doha ont désigné le régime iranien comme l'ennemi à abattre. Elles veulent la chute du régime syrien anti-wahhabite et pro-russe, afin de transformer la Syrie en base arrière pour reconquérir l'Irak - majoritairement chiite - et déstabiliser l'Iran. Elles cherchent aussi à liquider le Hezbollah libanais. En cela, leur agenda se confond avec celui de Washington ;

- détruire les fondements de l'Etat-nation laïc syrien pour le remplacer par un régime islamiste. Cela signifie livrer Damas aux forces wahhabites et salafistes favorables aux pétromonarchies du Golfe, ce qui signifie l'éclatement du pays en plusieurs entités en guerre entre elles ou, pire, l'asservissement voire le massacre des minorités non sunnites.

Ces objectifs non avoués n'ont pas été jusqu'ici atteints et ne le seront pas tant qu'existera le soutien sino-russe et tant que l'axe Damas-Téhéran ne se disloquera pas.

 

Le faux prétexte des armes chimiques

Face à la résistance de l'Etat syrien et de ses soutiens, la coalition américano-wahhabite a décidé d'employer les grands moyens afin de faire basculer l'opinion et de justifier une intervention militaire : accuser Damas de recourir aux armes chimiques contre sa propre population.

Une première tentative a été entreprise en avril dernier. Malheureusement, l'enquête des inspecteurs de l'ONU a révélé que l'usage d'armes chimiques était le fait de la rébellion. Ce rapport n'allant pas dans le sens que souhaitait la coalition américano-wahhabite, il a été immédiatement enterré. Seul le courage de Carla del Ponte a permis de révéler le pot aux roses. Notons cependant que les « médias qui donnent le ton » se sont empressés de ne pas lui accorder l'accès à leur antenne et que cette enquête a été largement passée sous silence.

Les événements du 21 août dernier semblent clairement relever de la même logique. Une nouvelle fois, de nombreux éléments conduisent à penser qu'il s'agit d'un montage total, d'une nouvelle campagne de grande envergure pour déstabiliser le régime :

- le bombardement a eu lieu dans la banlieue de Damas, à quelques kilomètres du palais présidentiel. Or, nous savons tous que les gaz sont volatils et auraient pu atteindre celui-ci. L'armée syrienne n'aurait jamais fait cela sauf à vouloir liquider son président !

- les vecteurs utilisés, présentés par la presse, ne ressemblent à aucun missile en service dans l'armée syrienne, ni même à aucun modèle connu. Cela pourrait confirmer leur origine artisanale, donc terroriste ;

- de plus, des inspecteurs de l'ONU étaient alors présents à Damas et disposaient des moyens d'enquête adéquats pour confondre immédiatement le régime ;

- les vidéos présentées ne prouvent rien, certaines sont même de grossières mises en scène ;

- enfin, le régime, qui reconquiert peu à peu les zones tenues par la rébellion, savait pertinemment que l'emploi d'armes chimiques était une « ligne rouge » à ne pas franchir, car cela déclencherait immédiatement une intervention militaire occidentale. Dès lors, pourquoi aurait-il pris in tel risque ?

Aucune preuve sérieuse n'a été présentée à l'appui la « culpabilité » de l'armée syrienne. Au contraire, tout conduit à penser que ce sont les rebelles qui ont utilisé ces armes, car contrairement à ce qui est avancé par la note déclassifiée publiée par le gouvernement français, les capacités chimiques des terroristes sont avérées :

- en Irak (d'où proviennent une partie des djihadistes de la rébellion syrienne), les autorités ont démantelé début juin 2013 une cellule d'Al-Qaida qui préparait des armes chimiques. Trois laboratoires ont été trouvés à Bagdad et dans ses environs avec des produits précurseurs et des modes opératoires de fabrication de gaz sarin et moutarde ;

- en Syrie, le Front Al-Nosra est suspecté avoir lancé des attaques au chlore en mars 2013 qui auraient causé la mort de 26 Syriens dont 16 militaires ;

- pour sa part, Al-Qaida a procédé en 2007 une douzaine d'attaques du même type à Bagdad et dans les provinces d'Anbar et de Diyala, ce qui a causé la mort de 32 Irakiens et en a blessé 600 autres. En 2002, des vidéos montrant des expérimentations d'armes chimiques sur des chiens ont été trouvées dans le camp de Darunta, près de la ville de Jalalabad, en Afghanistan.

 

Les errements de la politique étrangère française

A l'occasion cet imbroglio politico-médiatique dans lequel ses intérêts stratégiques ne sont pas en jeu, le gouvernement français mène une politique incompréhensible pour nos concitoyens comme pour l'étranger.

Depuis deux ans, la France, par le biais de ses services spéciaux - comme d'ailleurs les Américains, les Britanniques et les Turcs - entraîne les rebelles syriens et leur fournit une assistance logistique et technique, laissant l'Arabie saoudite et le Qatar les approvisionner en armes et en munitions.

Ainsi, la situation syrienne place la France devant ses contradictions. Nous luttons contre les djihadistes au Mali, après les avoir aidés à prendre le pouvoir à Tripoli - en raison de l'intervention inconsidérée de l'OTAN en Libye, en 2011, dans laquelle Paris a joué un rôle clé - et continuons de les soutenir en Syrie, en dépit du bon sens. Certes le régime de Bachar Al-Assad n'est pas un modèle de démocratie et il servait clairement les intérêts de la minorité alaouite, mais il est infiniment plus « libéral » que les monarchies wahhabites : la Syrie est un Etat laïque où la liberté religieuse existe et où le statut de la femme est respecté. De plus, il convient de rappeler que Damas a participé activement à la lutte contre Al-Qaïda depuis 2002. Pourtant, nous continuons d'être alliés à l'Arabie saoudite et au Qatar, deux Etats parmi les plus réactionnaires du monde arabo-musulman, qui, après avoir engendré et appuyé Ben Laden, soutiennent les groupes salafistes partout dans le monde, y compris dans nos banlieues. Certes, notre soutien aux agendas saoudien et qatari se nourrit sans nul doute de l'espoir de quelques contrats d'armement ou pétroliers, ou de prêts financiers pour résoudre une crise que nos gouvernants semblent incapables de juguler.

Une question mérite donc d'être posée : la France a-t-elle encore une politique étrangère ou fait-elle celle du Qatar, de l'Arabie saoudite et des Etats-Unis ? Depuis la présidence de Nicolas Sarkozy la France aligne ses positions internationales sur celles des Etats-Unis et a perdu, de ce fait, l'énorme capital de sympathie que la politique du général de Gaulle - non ingérence dans les affaires intérieures des Etats et défense du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes - lui avait constitué.

Si les élections de mai 2012 ont amené un nouveau président, la politique étrangère n'a pas changé. En fait, nous observons depuis plusieurs années la conversion progressive d'une partie des élites françaises - de droite comme de gauche - aux thèses néoconservatrices américaines : supériorité de l'Occident, néocolonialisme, ordre moral, apologie de l'emploi de la force ...

Surtout, un fait nouveau doit être mis en lumière : la tentative maladroite des plus hautes autorités de l'Etat de manipuler la production des services de renseignement afin d'influer sur l'opinion publique et de provoquer un vote favorable des parlementaires. Ce type de manœuvre avait été conduit par Washington et Londres afin de justifier l'invasion de l'Irak en 2003, avant d'être dénoncé. Onze ans plus tard, le gouvernement recourt au même artifice grossier et éculé pour justifier ses choix diplomatiques et militaires. Compte tenu de la faiblesse des arguments présentés dans la note gouvernementale - qui n'est pas, rappelons-le, une note des services -, celle-ci ne sera d'aucune influence sur la presse et l'opinion. En revanche, par sa présentation, elle contribue à décrédibiliser le travail des services de renseignement, manipulés à leur insu dans cette affaire.

Le mépris des politiques français à l'égard des services est connu. Est-ce un hasard si cette affaire survient alors que l'actuel ministre des Affaires étrangères est celui-là même qui, en 1985, alors qu'il était chef du gouvernement, a fort élégamment « ouvert le parapluie », clamant son absence de responsabilité à l'occasion de l'affaire du Rainbow Warrior ?

Une chose au moins est sûre : une remise à plat de notre position à l'égard de la Syrie et de notre politique étrangère s'impose, car « errare humanum est, perseverare diabolicum ».

 

Eric Denécé / 06-09-2013

 

Ce texte reprend, pour partie, des analyses produites par Alain Chouet, Alain Corvez

et Alain Rodier, tous trois anciens officiers du renseignement français.

 

Source : Centre Français de Recherche sur le Renseignement

 

http://www.cf2r.org/fr/editorial-eric-denece-lst/intervention-en-syrie-la-recherche-un-pretexte-a-tout-prix.php

 

Via L'information Nationaliste

 

syrie,politique