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03/03/2013

3 mars (1940), journée nationale du vin chaud du soldat.

 

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Photos tirées de "Affiches 1939-1945"

Stéphane Marchetti / France Loisirs

02/03/2013

De l’art de la sidération

Extrait de « La guerre des mots », d’Ivan Karpeltzeff

( Les Éditions de la Forêt / 2005 )  

 

De l’art de la sidération

 

Pour décourager les velléités de regroupement contre ses premières menées subversives, on s’efforcera par ailleurs d’insuffler aux individus le sentiment de leur impuissance : il faut les « sidérer » (disait Babeuf), les inhiber, les rendre isolés, déroutés, ridicules. Dans cette optique, le « Peuple » n’est plus qu’une vague silhouette de carton sans visage, qu’on brandit habilement pour engendrer une race de bovins apathiques et craintifs, ceux que Bernanos appelait les « décolorés »…

(…)

Isolés, déroutés, ridicules ? Qu’on aille pas croire qu’il faut pour cela de sombres et subtiles manipulations machiavéliques d’intellectuels pervers, à l’usage d’intellectuels tout aussi pervers de l’autre camp, comme les médias aiment à caricaturer – dans le registre « feuilletons », mais bien sûr surtout pas dans le registre « information » – la guerre des services secrets. Au contraire, la manipulation s’en prend au cadre de la vie quotidienne, et des exemples sont hélas indispensables pour montrer à quel point deviennent nocives des fabrications, admises comme des évidences, qui devraient tout au plus faire rire, ou hausser les épaules, les citoyens d’une culture qui aurait échappé à la gangrène constructiviste :

– Citons d’abord les « journées mondiales » de ceci ou de cela, en observant, en une sorte de pléonasme surréaliste, qu’il y en a plusieurs chaque jour ; et en soulignant que les journées mondiales de ceci ou cela sont passées de mode : il n’y a plus guère désormais que des journées mondiales contre ceci ou contre cela… même si le « contre » peut encore être retournée en « pour » par les techniques de trafiquage du vocabulaire examinées plus haut. N’y a-t-il pas une « Journée mondiale pour le refus de la misère et de l’exclusion » ? Toujours l’incantation totémique : comme si « militer pour le refus » de la misère avait le moindre lien avec la suppression de cette dernière… On nous pardonnera aussi – ou pas – de rappeler qu’il y a quelques années, la première « Journée mondiale contre le SIDA » fournit l’occasion d’innombrables lapsus qui la transformaient en « Journée mondiale pour le SIDA »… mais étaient-ce réellement des lapsus ? On pourra remarquer enfin que le choix des thèmes met parfois en exergue l’incohérence essentielle de la pensée politkor, à laquelle il arrive de « se prendre les pieds dans le tapis » : ainsi par exemple de la « journée mondiale de la femme » : les « chiennes de garde », qui devraient hurler à la mort leur indignation que 364 jours par an (365 les années bissextiles) soient dédiés à l’homme, sont pourtant les premières à encenser cette manifestation « sexiste »… Et vous rappelez-vous le « développement durable », épinglé plus haut dans cet ouvrage comme un chef-d’œuvre de perversion ? Voici qui est confirmé, puisqu’il va avoir droit non pas à sa journée, mais à une semaine entière… distinction qui mériterait une place d’honneur sur la scène de la « Journée mondiale du rire » qui, curieusement, ne figure pas dans la collection.

– Voyez ensuite la technique qui consiste à culpabiliser, voire à diaboliser, un acte social en lui-même complètement neutre ; une application caricaturale en est en ces temps très à la mode : « l’automobiliste, voilà le Grand Satan ». Il roule trop vite ? Qu’on le pende ! Il a bu un coup de trop ? Qu’on le fusille ! Il lui manque une vignette, une pastille verte, une carte grise, verte ou arc-en-ciel ? Qu’on l’écartèle ! Le pauvre conducteur est transformé en un ahurissant avatar du « salaud » au sens de Sartre. Nous ne serions plus étonnés que les pouvoirs publics lancent une campagne sur le thème : « Faut-il rétablir la peine de mort pour le conducteur qui a passé à l’orange ? » ; et qu’elle recueille 90, voire 100 ou 110% de « oui »… Nous sommes même prêts à croire les pauvres automobilistes assez traumatisés pour accepter à plat ventre un aménagement du code de la route qui leur imposerait de ne rouler de jour qu’avec un casque (« d’un modèle agréé » et donc soumis à une taxe, bien évidemment), un gyrophare, tous feux allumés et klaxon bloqué ; ce ne seraient plus des capitaines, mais des généraux de gendarmerie auxquels les politiques intimeraient l’ordre de venir cautionner « dans le poste » de telles calembredaines… pendant qu’ils continueraient bien sûr, au nom de la liberté, d’avoir des pudeurs de vierges effarouchées pour refuser le dépistage de la drogue au volant et, au nom de la lâcheté, de ne jamais citer dans les causes d’accidents les insuffisances des infrastructures routières ; sans que cela les empêche, bien sûr, d’empocher avec une prestesse de vieilles professionnelles le fric des amendes.

– L’automobiliste n’est pas le seul « salaud », loin s’en faut : il y a, en bonne place, le fumeur ; l’artisan obligé de travailler au noir pour retarder son assassinat par le fisc et l’URSSAF (pour celui-là une précision technique s’impose : il n’est salaud que s’il est blanc ; d’ailleurs sinon, le fisc et l’URSSAF ne le voient pas) ; le gosse – aussitôt puni par son instituteur, pardon son « professeur des écoles » – qui n’amène pas son paquet de riz à l’école pour les pauvres affamés du Tiers-Monde ; l’ignoble individu qui refuse de donner à toute la cohorte agressive des racketteurs humanitaires qui tendent leur sébiles à la porte du supermarché ou de la station de métro ; celui, encore plus infect, qui ne se laisse pas dépouiller par des « jeunes qui expriment leur mal-être » ; le paysan qui ose se plaindre que des « ravers » aient saccagé sa récolte ; la jolie fille et la petite vieille, qui – même si leurs raisons sont bien différentes – ont le culot de se boucler chez elles au coucher du soleil… Bref, le miroir déformant des médias renvoie à tous l’image d’une caricature de « salaud » : quand tous les miroirs renvoient cette image aux « pauvres gens » tous les jours, comment ne finiraient-ils pas par craquer, et y croire ? C’est bien le but recherché…

L’efficacité de cette technique de « salopage » est grandement renforcée par son matraquage incessant ; mais il faut avoir bien présent à l’esprit qu’elle est fondée à l’essentiel sur une réalité biologique : le courage est une vertu rare chez les hommes. Dans leur immense majorité, ceux-ci, quand ils sont confrontés à des comportements qu’au fond d’eux même ils réprouvent, « s’écrasent » dès lors que la manifestation de cette réprobation peut être dangereuse pour eux… Qu’on songe seulement aux incessantes agressions des voyous ethniques dans les transports en commun, pour lesquelles les médias soulignent complaisamment la lâcheté des témoins (« dans le wagon, personne n’a bougé ») : on doit certes s’en désoler, mais aussi constater que cette veulerie, outre qu’elle est souvent inexplicable au regard des risques physiques encourus, n’a pu se banaliser qu’après l’aboutissement d’un long processus de désagrégation morale. Il faut être réaliste, et surtout ne pas penser qu’on pourra transformer, d’un coup de baguette magique, des moutons en héros ; on doit par contre s’inspirer de la valeur d’exemple du héros (dont le caractère fondamental a été remarquablement mis en lumière dans les œuvres de Jean Haudry), chacun à la mesure de ses moyens : c’est par de petits gestes de résistance, même s’ils semblent au début dérisoires, que commence le « déconditionnement » des moutons ; et c’est en les multipliant, puis en les amplifiant progressivement, qu’on refera des moutons des hommes.

 

Ivan Karpeltzeff

( La guerre des mots / Les Éditions de la Forêt – 2005 )

> http://www.leseditionsdelaforet.com/  

  

Ivan Karpeltzeff, La guerre des mots, Les Éditions de la Forêt, cartouches, identité

 

Acheter le livre : http://www.leseditionsdelaforet.com/content/view/16/27/

 

08/12/2012

Man against time...

 

08 décembre 1984

  

« Donnez vos âmes à vos dieux et chargez vos fusils. Il est temps que parle l’acier.

Nous sommes les légions des damnés, l’armée de ceux qui sont déjà morts… »

 

Robert Jay Mathews

19/09/2012

Ruiner les intégristes…

Ruiner les intégristes…

Un bon plan…

 

A Paris, des clients déchirent "Charlie Hebdo"

devant les kiosques à journaux.

 

Des clients se sont précipités dans des kiosques à Paris mercredi matin, dans le but d'acheter et de détruire les exemplaires de Charlie Hebdo contenant les caricatures de Mahomet, selon des kiosquiers de Belleville, dans l'est de la capitale. "Quand j'ai ouvert à 6 heures ce matin, un homme attendait déjà là, une liasse de billets à la main. Il m'a demandé tous les exemplaires de Charlie Hebdo, avant de me dire qu'il comptait les détruire, ainsi que tous ceux qu'il trouverait chez les vendeurs de journaux du coin", a déclaré un kiosquier qui avait vendu tout son stock à 8 heures. Un autre kiosquier du quartier a vu ses clients chiffonner sous ses yeux les exemplaires du journal satirique qu'ils venaient de lui acheter, lui reprochant de vendre un journal qui "allait créer des problèmes en France".

 

(aliceadsl.lemonde.fr / Mercredi 19 nov.2012)

 

Quel dommage que nous ayons tous oublié jusqu’au sens même des mots COURAGE, intelligence, combat et solidaritéSans quoi, la « solidarité de la presse » pourrait rendre un grand service à l’humanité tout entière…

Puisqu’il suffirait que l’ENSEMBLE de ladite « presse » publie quotidiennement des caricatures de Mahomet (pendant quelques semaines) pour ruiner l’ensemble des intégristes… obligés d’acheter des millions de journaux et magazines chaque matin ! ( Héhé! )…  

 

Kurgan.    

intégristes,caricatures mahomet

Mahomet par Gotlib (1972)

Dans God’sClub (c) Fluide Glacial/Audie.

10/09/2012

Les grands ducs...

« - Ton client là, Fouquet. Ton espagnol. Douze verres cassés ça t’dis rien ?

- Monsieur. Primo, voila quinze ans que je vous interdis de me parler. deusio, si vous ne vouliez pas qu'il boive, c'est simple, vous n'aviez qu'a pas le servir.

- Alors là monsieur, je vous rétorque que, primo, je l'ai viré. deusio, les ivrognes y'en a assez dans le pays sans que vous les fassiez venir de Paris.

- Un ivrogne ?

- Ah ben oui ! Un peu ! Même le père Bardasse qui boit quatorze pastis par jour n'en revenait pas !

- Ah parce que tu mélanges tout ça, toi ! Mon Espagnol, comme tu dis, et le père Bardasse. Les Grands Ducs et les boit-sans-soif.

- Les grands ducs ?!

- Oui monsieur, les princes de la cuite, les seigneurs, ceux avec qui tu buvais le coup dans le temps et qu'ont toujours fait verre à part. Dis-toi bien que tes clients et toi, ils vous laissent à vos putasseries. Ils sont à cent mille verres de vous ! Eux, ils tutoient les anges !

- Excuse-moi mais nous autres, on est encore capable de tenir le litre sans se prendre pour Dieu le Père.

- Mais c'est bien ce que je vous reproche. Vous avez le vin petit et la cuite mesquine. Dans le fond vous méritez pas de boire. Tu t'demandes pourquoi y picole l'Espagnol ? C'est pour essayer d'oublier des pignoufs comme vous. »

Michel AudiardUn singe en hiver.

 

« La mère et la fille, belles et brunes, chacune dans son genre. Regards de braise, taille souple, profil grec, cheveux mousseux sur les tempes et séparés par une raie que je vais qualifier de médiane sans que ça fasse un pli. Habillées de noir, l’une et l’autre, comme des dames de l’île de Sein. Avec des seins comme des îles. Et des lèvres brillantes comme l’huile de ricin. Et des culs si perfectionnés que tu voudrais t’y faire naturaliser sicilien ! Et des jambes que c’est dommage qu’elles portent des jupes si longues tellement on les devine bien complètement parfaites de bas en haut. Et des bouches qui te font penser à des colliers à zob. Et des dents si blanches que tu comprends la fraîcheur consécutive de leur haleine. Et des oreilles que n’importe quel connard à petit tirage d’écrivaillon prétendrait finement ourlées, parfaitement ma chère. Et aussi des épaules douces et rondes que leurs bras s’y accrochent à la perfection. Et des nuques pour le baiser. Et puis putain d’Adèle, des ventres plats, fermes et souples à la fois, pour te servir d’oreiller avant et après l’amour. Et puis encore, des mains de madones kif-kif sur les tableaux de fra machin et de Michel-Ange. La mère et la fille, superbement identiques, se donnant la réplique du miroir à dix huit ans d’intervalle. Bellissimales, les deux. A croquer, que dis-je, à bouffer ! Et comme il faut espère. »

Frédéric Dard.

 

« Heureusement que Jésus-Christ n'est pas mort dans son lit. Sinon, en Bretagne, il y aurait un sommier en granit à chaque carrefour. »

Jean Yanne.

 

« Je vis au seuil de moi-même, à l'intérieur il fait sombre. »

Antoine Blondin, Un singe en hiver.

 

« Ça commence par un petit garçon plutôt blond qui laisse aller ses sentiments. Le visage de Marlène Dietrich, plein de sperme, s'étale devant lui. Sur le magazine grand ouvert, le long des jambes de l'actrice, des filets nacrés s'entrelacent comme la hongroise d'argent sur le calot d'un hussard.

Il se lève et s'approche d'un bureau. Il s'assied. Il ouvre un tiroir. Dans un carnet de blanchisseuse à couverture de molesquine noire, il cherche la bonne page. Il écrit : 22 mars 1937 : 8. Il tire une barre et additionne 8 au chiffre précédent. Puis il note : 1454, dans une troisième colonne. « Rien ne vaut une comptabilité bien à jour », dit-il à voix basse. Il écarquille les yeux et va se regarder dans la glace. On ne parle pas tout seul, à moins que d'être fou. Cependant, Larousse dit des choses très fortes sur les résultats néfastes du plaisir solitaire. Ils appellent ça le plaisir. Salaud de Larousse. »

Roger Nimier, Les épées.

 

07/05/2012

Les merguez c’est maintenant !

La messe est dite...

06/05/2012

Pauvre(s) de nous...

Il est 21h30 en ce dimanche 6 mai 2012, et je me suis dit : « allez, sois le seul français, ce soir, à parler d’autre chose que de ce second tour pathétique ! »…

Sur quoi, j’ai donc tapé « 6 mai » dans Google, en me disant que cet acte ô combien banal allait très certainement me donner ( via Wikipédia ) matière à poster quelque chose d'ô combien instructif du genre : … 

- 6 mai 1097 : la première croisade arrive devant Nicée.

Ou…

- 6 mai 1210 : Incendie de la cathédrale de Reims, dont on a accusé l'archevêque Albéric de Humbert, qui aurait trouvé ce seul moyen pour reconstruire en plus beau et surtout en plus grandiose.

Ou…

- 6 mai 1576 : Signature de l'Édit de Beaulieu qui met fin à la cinquième guerre de religion en reconnaissant le culte protestant. 

Ou…

- 6 mai 1682 : Le clergé français réaffirme les libertés de l'Église gallicane après la protestation du pape suite à la déclaration du 19 mars.

Ou…

- 6 mai 1916 : les Ottomans pendent, au Mont-Liban, vingt-et-un nationalistes libanais qui demandaient l'indépendance du Liban de l'empire ottoman.

Ou…

- 6 mai 1941 : Staline devient chef du gouvernement soviétique, succédant à Molotov.

Voir même ( et au pire ) …

- 6 mai 2001 : Jean-Paul II devient le premier pape à se rendre dans une mosquée.

 

Enfin… quelque chose comme ça quoi…

Quelque chose de bien catholico-judéo-gaucho-islamo-pouet-pouet dans la droite lignée des incontournables (et indispensables) connaissances catholico-judéo-gaucho-islamo-pouet-pouet dispensées par Wikipédia, l’encyclopédie virtuelle des catholico-judéo-gaucho-islamo-pseudo-intellos-du-net…

 

Et puis je suis allé jusqu’en bas ( de la page Wikipédia )…

Et là qu’ai-je vu !? > 06 mai 2012 : Élection présidentielle française, 2ème tour : François Hollande est élu président de la République française. ( !?!?!!!!??!?!?!!! )…

 

Et je n’ai pu m’empêcher d’avoir une pensée pour ce militant « socialiste » cramponné à son clavier dès 19h50… qui a patiemment attendu 20 heures et une seconde… pour être le premier humain de l’univers à ajouter cette ligne ( ô combien vitale ) à Wiki-mouton-pédia !

 

Je n'ai pu m'empêcher de me dire qu'un sarkozyste avait dû rêver d'être à sa place…

 

Je n’ai pu m’empêcher de me dire : …

 

Pauvre de lui… n'avait-il vraiment rien d'autre à faire de sa vie ? 

Pauvre(s) d'eux… n'avaient-ils vraiment rien d'autre à faire de leurs vies ? 


Mais surtout...

Pauvre(s) de nous…

 

pauvre(s) de nous...

24/04/2012

Pensées du moment...

         Sarkozy_grimace.jpg     Francois-hollande.jpg 

« On ne saurait assez s’élever contre l’idée stupide

que le génie pourrait-être le résultat du suffrage universel. »

( A. Hitler )

 

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Bon, je l’avoue humblement…

J’ai entièrement volé cette note à l’excellentissime Chemin sous les buis

Mais que voulez-vous, elle reflète tant et si bien mes pensées du moment, 

Que je n’ai pas pu m’empêcher ! Ha ha…

03/04/2012

Car il faut, indispensablement, que cela finisse…

C'est pourquoi tout ce qui a quelque quantité virile, depuis une trentaine d'années, se précipite éperdument au désespoir. Cela fait toute une littérature qui est véritablement une littérature de désespérés. [...] Il ne faut pas chercher cette situation inouïe des âmes supérieures en un autre point de l'histoire que cette fin de siècle, où le mépris de toute transcendance intellectuelle ou morale est précisément arrivé à une sorte de contrefaçon du miracle.

Que diable voulez-vous que puisse rêver, aujourd'hui, un adolescent que les disciplines modernes exaspèrent et que l'exploitation commerciale fait vomir ? Les croisades ne sont plus, ni les nobles aventures lointaines d'aucune sorte. Le globe entier est devenu raisonnable et on est assuré de rencontrer un excrément anglais à toutes les intersections de l'infini. Il ne reste plus que l'Art. Un art proscrit, il est vrai, méprisé, subalternisé, famélique, fugitif, guenilleux et catacombal. Mais, quand même, c'est l'unique refuge pour quelques âmes altissimes condamnées à traîner leur souffrante carcasse dans les charogneux carrefours du monde.

Aux yeux de ce contempteur universel, la Mort était vraiment la seule souveraine qui eût le pouvoir d'ennoblir tout de bon la fripouille humaine. Les médiocres, les plus abjects lui devenaient augustes aussitôt qu'ils commençaient à pourrir. La charogne du plus immonde bourgeois se calant et se cantonnant dans sa bière pour une sereine déliquescence lui paraissait un témoignage surprenant de l'originelle dignité de l'homme.

Le mal est plus universel et paraît plus grand, à cette heure, qu'il ne fut jamais, parce que, jamais encore, la civilisation n'avait pendu si près de terre, les âmes n'avaient été si avilies, ni le bras des maîtres si débile. Il va devenir plus grand encore. La République des Vaincus n'a pas mis bas toute sa ventrée de malédiction. Nous descendons spiralement, depuis quinze années, dans un vortex d'infamie, et notre descente s'accélère jusqu'à perdre la respiration.

Alors quelle joie de déshonorer une belle œuvre, quand il s'en trouve une, de la vautrer dans la boue de son analyse, de la descendre au niveau du groin de son auditoire ! Et le journaliste est à l'image du conférencier. Il apparaît, ici aussi bien que là, comme le châtiment, la flétrissure infinie, la tare vivante d'une société assez avachie pour ne plus avoir conscience des attitudes qu'on la force à prendre et des vomissures qu'on lui fait manger. [...]

Il parait tout simple, aujourd'hui, de recevoir avec honneur et de pavoiser de décorations d'abominables cabots que les bonnes gens d'autrefois auraient refusé de faire coucher à l'écurie, par crainte qu'ils ne communiquassent aux chevaux la morve de leur profession.

Eh bien, nous allons nous amuser, nous autres, les crevants de faim et les porte-loques. Vous ne regardez jamais ceux qui pleurent et ne pensez qu'à vous divertir. Mais ceux qui pleurent en vous regardant, depuis des milliers d'années, vont enfin se divertir à leur tour et – puisque la Justice est décidément absente – ils vont, du moins, en inaugurer le simulacre, en vous faisant servir leurs divertissements. Puisque nous sommes des criminels et des damnés, nous allons nous promouvoir nous-mêmes à la dignité de parfaits démons, pour vous exterminer ineffablement.

Ils se tordront de terreur, les Richard-cœurs-de-porcs et leurs impitoyables femelles, ils beugleront en ouvrant des gueules où le sang des misérables apparaîtra en caillots pourris ! Ils oublieront, d'un inexprimable oubli, la tenue décente et les airs charmants des salons, quand on les déshabillera de leur chair et qu'on leur brûlera la tête avec des charbons ardents, – et il n'y aura plus l'ombre d'un chroniqueur nauséeux, pour en informer un public de bourgeois en capilotade !

Car il faut, indispensablement, que cela finisse, toute cette ordure de l'avarice et de l'égoïsme humains !

 

Léon Bloy : « Le désespéré » ( 1886… mais tellement d’actualité en 2012 !!! )

 

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02/03/2012

Jean-Paul Bourre : La St Jean Dieu